
28 Décembre 2022 – Par La COOP Villaroise
En quoi choisir le « bon commerce » est-il tout aussi important que choisir le « bon produit » ?
Si choisir les bons produits – c’est à dire ceux disposant de vrai label tel que AB, Nature & Progrès ou Bio Cohérence et non pas ceux arborant des mentions trompeuses du type « Haute Valeur Environnementale » – voir notre tribune du mois dernier – est une première étape essentielle, choisir le bon commerce l’est tout autant. Peut-être aujourd’hui plus que jamais.
Nous avons décidé de créer la COOP Villaroise non pas pour faire un n-ième magasin bio, mais au contraire pour créer une rupture dans l’uniformisation mortifère de tous ces magasins bio, récents comme anciens, qui ont bien souvent perdu de vue leur raison d’être.
Le marché de la bio souffre énormément depuis 2 ans. Des dizaines de magasins (environ 200) ont fermé en 2021 et 2022, et des dizaines d’autres vont encore fermer ces prochains mois. À Saint-Quentin-En-Yvelines comme ailleurs.
Pour celles et ceux qui souhaitent soutenir, par leurs achats, un modèle plutôt qu’un autre, en toute connaissance de cause, nous vous proposons dans cet article quelques éclairages utiles.
Nous sommes un vrai magasin de proximité
Quand la majorité des magasins bio va s’installer dans d’immenses zones commerciales, à contre-courant de ce que nous a enseigné la crise récente du COVID-19, nous faisons le pari de la proximité, d’un magasin à taille humaine, du contact humain, du local, de la vie de quartier… Toute notre équipe est par ailleurs résidente de longue date de Guyancourt et impliquée dans la bio locale depuis 10 ans, à titres personnel et associatif.
Nous sommes un commerce 100% indépendant
Face à l’uniformisation des magasins bio et de leur offre, et face à leurs pratiques commerciales et sociales de plus en plus assimilables à celles de la grande distribution, nous avons opté pour l’indépendance et le format d’entreprise coopérative (SCOP). Notre magasin reflète nos valeurs et notre éthique. Pour nous, cela n’a pas de prix.
Qu’en est-il des franchises bio les plus connues ?
La Vie Claire. Ces magasins proposent globalement la même offre partout en France avec 57% de leurs ventes réalisées en « marque de distributeur » (= marque La Vie Claire) – Source : Biotopia Insight. Ils brillent très souvent par l’absence d’indication d’origine sur leurs emballages, lorsque celle-ci n’est pas obligatoire. Un comble pour des produits bio… De plus, les produits issus du commerce équitable sont quasiment absent de leur offre. L’avez-vous remarqué ? Quant aux produits locaux, selon les magasins, ils se comptent bien souvent sur les doigts d’une main.
Biocoop. Vu de notre fenêtre, le leader historique a pris depuis 6 ans environ un virage radical de réseau « militant » à réseau « commerçant ». Nous avions prévu d’ouvrir notre magasin sous franchise Biocoop au départ, mais en avons décidé autrement lorsque nous avons constaté – un exemple parmi d’autres – qu’il n’y a plus que des anciens patrons de la Grande Distribution au siège de Biocoop, situé au Trocadéro, dans le 16ème arrondissement (sic !) de Paris. Par exemple, le Directeur Général de Biocoop, M. Sylvain Ferry, recruté en 2021, a fait toute sa carrière chez Doux (les volailles industrielles) et Carrefour. Nous sommes bien loin des profils militants qui avaient fait la réussite de Biocoop, mais qui ont été limogés ces dernières années. Et c’est bien dommage. Nous observons aussi que la quasi-totalité des nouveaux magasins Biocoop s’ouvre sous format capitalistique traditionnel (= un·e gérant·e qui détient tout et décide de tout), lorsque les magasins historiques étaient de vraies coopératives (SCOP, SCIC, Associations de consommateurs). Pour faire « joli », de nombreux nouveaux magasins optent plutôt pour l’intégration de composantes de l’ESS (Economie Sociale et Solidaire) dans leurs statuts. Ces composantes, contrairement au Droit Coopératif qui s’applique chez nous, n’engagent à rien ou presque. Pour en savoir plus, nous vous invitons à lire cet article, intitulé « Pourquoi Biocoop devient Carrefour« , écrit par l’ancien cabinet de Conseil de Biocoop.
Les Comptoirs de la Bio : derrière cette enseigne se cache le mastodonte… Intermarché. Nul besoin d’en dire plus. Derrière Bio C Bon et So’Bio ? C’est Carrefour. Derrière Naturalia ? C’est Casino, qui réfléchit d’ailleurs à intégrer des produits non bio dans leur offre (en savoir plus)…
Ainsi, entre faire un magasin franchisé où tout est cadré et normalisé et créer notre propre commerce indépendant, fidèle à nos valeurs et à nos aspirations, le choix a finalement été très facile.
Pour nous, la bio est un projet de société et non un marché à exploiter.
Chez nous : pas de centrale d’achat. Nous travaillons en direct avec l’essentiel de nos fournisseurs.
Contrairement aux enseignes citées précédemment, à La COOP, les commandes ne sont pas faites d’un simple « clic » auprès d’une centrale d’achat. Nous travaillons avec près de 100 fournisseurs différents, dont plus de 60 sont locaux. Nous avons néanmoins deux grossistes, un situé à Rennes (35), l’autre à Carpentras (84), qui nous fournissent près de 50% de notre offre sur les grandes marques nationales habituelles des magasins bio (Pain des Fleurs, Favrichon, etc.). Pour tout le reste, nous travaillons en direct avec les marques et les producteurs de notre choix.
Cela représente beaucoup plus de travail pour nous, mais cela nous permet aussi de vous proposer une offre plus originale, ultra locale, et des tarifs plus intéressants sur une grande partie de notre offre. Une centrale d’achat ajoute en effet un surcoût aux magasins de l’ordre de 10% du prix du produit, parfois plus. Concernant les produits frais, une centrale d’achat signifie des intermédiaires et des délais en plus, qui impliquent une fraîcheur moindre au moment de l’arrivée en magasin. Chez nous, Romuald, un de nos maraîchers locaux, nous livre directement de Bonnelles (78) tous les mardis. Ses légumes étaient donc encore en pleine terre seulement quelques heures avant qu’ils ne vous soient proposés à la vente… Autre exemple : la ferme des Beurreries, située à 15 km du magasin, nous livre une à deux fois par semaine ses œufs, que vous pouvez donc retrouver « extra frais » la plupart du temps en magasin.
Les « marques de distributeurs » : non merci !
Il est important de savoir que derrière les « marques de distributeurs » se cachent plusieurs réalités peu enviables : uniformisation nationale des recettes et des produits ; création d’une relation de dépendance économique accrue entre le donneur d’ordre (l’enseigne bio) et le fabricant ; le donneur d’ordre s’approprie les savoir-faire de son sous-traitant vis-à-vis de ses clients ; le donneur d’ordre s’approprie une bonne partie des bénéfices que fait habituellement le fabricant lorsqu’il vend ses produits sous sa propre marque, etc.
Claude Gruffat, ancien Président de Biocoop, disait que, à l’instar de la biodiversité du vivant, la biodiversité des marques et des recettes est également fondamentale. Un parti pris depuis tombé aux oubliettes puisque la marque de distributeur de Biocoop représentera bientôt… 35% de son offre nationale (source : Biocoop).
Chez Biomonde, notre groupement de magasins bio indépendants, il est hors de question de créer une marque de distributeur. À La COOP, nous faisons même le choix inverse et souhaitons privilégier et valoriser autant de marques et de recettes que possibles. À ce jour, nous proposons plus de 700 marques différentes en magasin !
Nous sommes une SCOP, société coopérative de salarié·es
Chez nous, il n’y a pas de chef·fe ou d’actionnaire qui décide de tout pour les autres, ni personne qui encaisse les bénéfices générés par le travail des autres. Chaque membre de l’équipe dispose d’une voix dans toutes nos prises de décisions. Les bénéfices, lorsque nous en ferons, seront partagés de manière égalitaire entre chacun·e, quel que soit le niveau d’apport en capital dans l’entreprise.
Mieux encore, une association de loi 1901, Les Symbiotes, réunit tout notre réseau associatif local (60 familles environ) et dispose d’une voix dans les instances de La COOP. L’association détient également un tiers du capital du magasin.
Malheureusement, un nombre infime de sociétés fonctionnent sous droit coopératif en France. Ce modèle pourrait pourtant proposer une réponse forte à la réduction des inégalités et des injustices sociales.